À l’horizon 2025, près d’une entreprise sur deux pourrait être victime d’une cyberattaque via ses fournisseurs. Le cabinet Gartner estime que ces incidents ont déjà augmenté de 300 % depuis 2021. Une tendance lourde qui révèle un changement de stratégie des cybercriminels : plutôt que d’attaquer les grandes entreprises directement, mieux protégées, ils s’infiltrent par leurs prestataires.
Pourquoi les sous-traitants sont devenus la cible idéale
La logique des attaquants est implacable : un seul fournisseur compromis peut ouvrir la voie à des milliers de victimes. Les sous-traitants, souvent moins armés en cybersécurité que leurs clients, représentent une faille systémique.
À cela s’ajoute un élément psychologique : la confiance implicite accordée aux partenaires. Or, cette confiance est précisément ce que les cybercriminels exploitent.
Les chiffres en témoignent. En 2024, la moitié des incidents rapportés dans l’Union européenne concernaient des secteurs hautement stratégiques – santé, énergie, transport – tous dépendants de chaînes de sous-traitance.
Des impacts qui dépassent l’informatique
Les attaques sur la chaîne d’approvisionnement ne se limitent pas à une panne passagère. Elles entraînent des pertes économiques, juridiques et réputationnelles.
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4,91 millions de dollars : coût moyen d’un incident prévu en 2025.
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267 jours : temps moyen nécessaire pour se remettre d’une attaque.
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138 milliards de dollars : pertes globales estimées d’ici 2031.
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40 % des cyberattaques ciblent déjà les PME et TPE, avec un coût moyen de 59 000 € par incident.
Pour une petite structure, ces chiffres se traduisent souvent par des semaines d’arrêt d’activité – et parfois, la faillite.
Trois attaques qui ont marqué un tournant
Certaines affaires récentes ont montré la puissance de l’effet domino :
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SolarWinds : 18 000 organisations espionnées pendant 14 mois.
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Kaseya : 1 500 entreprises paralysées via leurs prestataires IT.
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MOVEit : 93,3 millions de personnes exposées à la suite d’une seule faille.
Ces cas démontrent qu’une vulnérabilité unique peut provoquer une onde de choc mondiale.
Comment renforcer la résilience ?
La cybersécurité ne peut plus se limiter aux frontières de l’entreprise. Elle doit inclure tout l’écosystème de partenaires. Parmi les pistes incontournables :
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Cartographier ses dépendances grâce à un inventaire des composants logiciels (SBOM).
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Adopter le principe de Zero Trust : ne jamais faire confiance par défaut, même à ses fournisseurs.
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Surveiller en continu les activités suspectes, comme le recommande l’ANSSI.
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Évaluer la robustesse des prestataires, exigence centrale du règlement européen DORA.
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S’appuyer sur des normes reconnues, telles que l’ISO 27001, pour prouver la solidité de ses dispositifs.
L’intelligence artificielle, alliée ou menace ?
L’IA amplifie la course entre attaquants et défenseurs.
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Côté pirates : intrusions automatisées, phishing ultra-ciblé, exploitation de failles à grande échelle.
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Côté entreprises : détection prédictive, analyse comportementale, réponse rapide aux incidents.
Le retard d’adoption de ces outils par les sous-traitants pourrait aggraver leur vulnérabilité.
Une pression réglementaire accrue
Les institutions européennes durcissent les règles. Les prestataires ne peuvent plus se défausser :
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NIS2 engage directement la responsabilité des dirigeants en cas de manquement.
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DORA impose des clauses contractuelles et une surveillance accrue des fournisseurs TIC critiques.
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RGPD oblige à notifier toute violation de données dans les 72 heures, sous peine de sanctions pouvant atteindre 4 % du chiffre d’affaires mondial.
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CaRE, plus adapté aux PME, combine prévention, détection et indemnisation.
De la dépendance à la responsabilité
La cybersécurité n’est plus une affaire réservée aux spécialistes techniques. Elle est devenue un enjeu stratégique et vital pour la survie des entreprises.
Chaque sous-traitant doit comprendre qu’il est un maillon critique de la chaîne de valeur, qu’il peut devenir la porte d’entrée d’une cyberattaque, et qu’il engage désormais sa responsabilité légale et économique dans la résilience de ses clients.
👉 La question à poser à chaque dirigeant est simple : votre entreprise a-t-elle cartographié ses dépendances et évalué la robustesse cyber de ses fournisseurs ?
Parce qu’à l’ère numérique, la faiblesse de vos partenaires peut devenir… votre chute.